RJ Ellory – Une saison pour les ombres
(Roman / 2022 / The darkest season)

RJ Ellory est un auteur fascinant qui ne m’a jamais déçu.
Les critiques de Une saison pour les ombres évoquent souvent une filiation avec Seul le silence. J’avais découvert RJ Ellory avec ce premier roman paru en France. À l’époque, j’avais noté : « Un roman époustouflant. C’est comme si John Irving au meilleur de sa forme écrivait un roman d’une noirceur absolue. À lire absolument ! » (*) Cette remarque s’applique aussi à Une saison pour les ombres et à bon nombre de ses romans.
RJ Ellory est inclassable. Polar ? Thriller ? Romans noirs ? Quelle serait la bonne case ? Je n’en sais rien. Un mélange de tout ça à la fois, sans doute, et plus encore. Le plus important est que RJ Ellory me régale avec ses histoires toujours renouvelées, son écriture chirurgicale, ses personnages travaillés, ses ambiances sombres. Il me surprend, me tient en haleine, m’instruit, me fait voyager, réfléchir et passer de merveilleux moments de lecture. Il est ma plus belle découverte chez Sonatine que je suis depuis leurs débuts.
De toute façon, Roger Jon Ellory n’a pas vocation à entrer dans une case (non, nous n’avons pas gardé les cochons ensemble RJ et moi, mais c’est comme ça que je me plais à l’imaginer).
Dans Une saison pour les ombres, RJ Ellory explore une fois de plus l’âme humaine, ses faiblesses, ses peurs, ses espoirs, sa noirceur, ses lâchetés, sa capacité à rebondir ou non. Il décortique la force du passé qui empêche de se libérer d’événements, de promesses et de lieux qu’on souhaiterait oublier. Il expose la puissance des superstitions transmises de génération en génération. Il décrit les rouages d’une petite ville coupée du monde, créée par une société minière dans le grand nord du Canada francophone, glacial, inhospitalier. Il raconte la folie qui peut s’emparer des gens en de pareilles circonstances. La folie intérieure mais aussi la folie meurtrière. Parce que, oui, le sang coule. Des jeunes filles meurent. Les autorités manquent de moyens. Tout le monde se voile la face. Un temps. Jusqu’à une énième victime. Jusqu’à la révélation.
RJ Ellory est un conteur exceptionnel.
(*) J’adore John Irving, cette comparaison très personnelle est donc un énorme compliment.
L’auteur et son œuvre
Roger Jon Ellory est né le 20 juin 1965 à Birmingham. Après l’orphelinat et la prison, il devient guitariste dans un groupe de rhythm and blues. Puis il se lance dans la photographie et l’écriture. Il met du temps à trouver un éditeur mais son travail et sa persévérance finissent par payer. Auteur de plus de 20 romans publiés à ce jour, il est reconnu mondialement. En France, son succès a été immédiat avec Seul le silence. Il remporte plusieurs prix littéraires.
Mon RJ Ellory ++
J’ai lu de nombreux romans de cet auteur. Je les ai tous adorés. Cinq chroniques supplémentaires.
Seul le silence
(Roman / 2007 / A quiet belief in angels)

Joseph Vaughan a douze ans. Il vit dans un trou perdu de Georgie, à Augusta Falls. La vie ne l’épargne pas. L’horreur atteint son paroxysme lorsqu’il découvre le corps d’une fillette sauvagement assassinée. La première d’une longue série. La police patauge. Joseph réussira-t-il à démasquer le coupable ? Ou, impuissant, sombrera-t-il dans la folie face à cette violence indescriptible ?
Le premier roman de R.J. Ellory publié en France. Mon premier Roger Jon Ellory. Une claque retentissante ! La plume sublime, la couleur, l’intrigue, les descriptions, la profondeur des personnages, la poésie crépusculaire, les dits et les non-dits, j’ai tout adoré. Je suis sorti abasourdi de cette lecture. J’avais peine à croire à cette apparition spontanée d’un auteur aussi talentueux. J’étais surpris que R.J. Ellory ne soit pas déjà célèbre avec un roman aussi parfait à son actif (il a ensuite très vite gagné en notoriété, ce qui était pour le moins mérité). Je ne suis pas masochiste, mais cette claque et la noirceur émanant de ce livre m’ont fait énormément de bien. L’impression d’avoir rencontré un ami inconnu qu’on attendait depuis si longtemps. Un roman sombre et attendrissant. Une histoire marquante. De la mélancolie apaisante. L’exploration de l’âme humaine. Une découverte qui n’allait pas rester sans lendemain. Je n’avais qu’une hâte : me procurer d’autres romans de ce mystérieux R.J. Ellory. Ce que j’ai fait et je ne l’ai jamais regretté.
Mauvaise étoile
(Roman / 2011 / Bad signs)

Texas, années 60. Elliott et Clarence, deux frères orphelins, n’imaginent pire enfer que leur vie en maison de correction pour mineur. Ils s’enfoncent néanmoins davantage dans les ténèbres lorsqu’ils sont pris en otage par Earl Sheridan, un tueur sanguinaire sans scrupule et sans état d’âme.
Mauvaise étoile est un roman palpitant qu’on ne referme qu’à contrecœur, lorsqu’on n’a pas d’autre choix. Le genre de livre qu’on a hâte de finir parce qu’on veut en connaître la fin et en même temps on aimerait qu’il ne se termine jamais parce qu’on vit une aventure haletante aux côtés des adolescents poursuivis par une poisse inconcevable.
R.J. Ellory fait parler son immense talent de conteur tout au long de ce road-movie sanglant et passionnant. Comme d’habitude, sa plume est précise et soignée, l’histoire entraînante et superbement construite et les personnages attachants ou repoussants. L’ensemble est dynamique, bourré de noirceur et d’humanité, bouleversant, captivant jusqu’aux dernières pages.
Assurément un de mes Ellory préférés.
Les Anges de New York
(Roman / 2010 / Saints of New York)

Frank Parish, policier new yorkais, est au bord de l’abîme. Il a perdu son partenaire, boit trop, a des difficultés relationnelles avec sa hiérarchie et sa famille, se moque de sa psychothérapeute qu’on l’oblige à consulter, se sent sombrer. Par ailleurs, il n’a pas réussi à se détacher d’un passé encombrant, d’un père à facettes multiples, héros de son vivant et jusqu’à sa mort dans l’exercice de ses fonctions au sein de cette même police. Sur la sellette, il se raccroche à une enquête, le meurtre d’une jeune fille, persuadé d’avoir affaire à un tueur en série.
Les Anges de New York est un roman jouissif. Autour du flic alcoolique et cynique, Roger Jon Ellory a construit un roman policier implacable, comportant tous les codes du genre. J’ai souvent ri à la lecture de ce livre. Je suis sûr que l’auteur s’est amusé à écrire le polar parfait, comprenant des rebondissements et une liste impressionnante de clichés, tout en évitant avec beaucoup d’habileté et de maîtrise de tomber dans le clichesque. Un livre sur le fil du rasoir, qu’on peut lire sur plusieurs niveaux. Un exercice de style magistral dans lequel on retrouve tout l’art, le talent et l’humour subtil de R.J. Ellory. Je me suis régalé !
Papillon de nuit
(Roman / 2003 / Candlemoth)

1982. Caroline du Sud. Daniel Ford est dans le couloir de la mort. Accusé d’avoir tué son meilleur ami, Nathan Verney, il attend l’application de la sentence. Avant son exécution, il raconte son histoire à un prêtre, John Rousseau.
Pour son premier roman publié, Roger Jon Ellory s’attaque à deux sujets qui lui tiennent à cœur : l’Amérique des années 60 et la peine de mort.
Il dresse un tableau sans complaisance de l’étroitesse d’esprit de l’Amérique profonde. La ségrégation bat son plein. Le KKK règne sans être inquiété. L’Histoire se construit au rythme du rock’n’roll, des drogues, des assassinats des Kennedy et de Martin Luther King, du bourbier de la guerre du Viet Nam, du scandale du Watergate et d’une justice approximative et expéditive. Ses héros et ses anonymes grandissent dans cette décennie effrénée, pour le meilleur et pour le pire. Souvent pour le pire quand on est noir. Et puis, il y a l’amitié et l’amour qui essayent de se faire une place au milieu de tout ça, des bouées de sauvetage pour ne pas étouffer dans la fange.
Le deuxième aspect abordé révèle le côté inhumain du couloir de la mort, des prisonniers qui attendent une grâce qui souvent ne viendra pas, qui attendent une date qui finit tôt ou tard par arriver, dans des conditions déplorables.
Premier roman publié et déjà cette plume à la fois ronde et acérée, déjà ces personnages fascinants, déjà cet art de conter des histoires magnifiques, déjà beaucoup d’humanité et déjà un chef-d’œuvre.
Un papillon de nuit noir et lumineux, obsédant et brutal, inoubliable.
Vendetta
(Roman / 2005 / A quiet vendetta)

2006. La Nouvelle Orleans. La fille du gouverneur de Louisiane est enlevée. Son ravisseur exige de ne traiter qu’avec Ray Hartmann, un fonctionnaire travaillant à Washington contre le crime organisé. Les forces de police obtempèrent. La confrontation démarre. Le kidnappeur mène le jeu et joue au chat et à la souris avec Hartmann. Au fil des jours, celui-ci se rend compte que son interlocuteur lui raconte sa vie de tueur à gages et cinquante ans de mafia américaine.
R.J. Ellory ne fait pas les choses à moitié, une fois de plus. Dans Vendetta, il présente aux lecteurs la face sombre de l’Amérique, la face cachée, celle de la mafia, du crime organisé, de la corruption, des trahisons et des vengeances, l’implication des hommes politiques. La tension monte crescendo. Les fausses pistes se succèdent. Une mécanique bien huilée pour arriver à un final étourdissant.
Je vais encore mettre en avant l’écriture aux petits oignons et le talent de conteur exceptionnel de R.J. Ellory, ses personnages travaillés et son goût du détail. Encore un livre de cet auteur que j’ai dévoré. Quand on aime, on ne compte pas.
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