Gaëlle Nohant – Légende d’un dormeur éveillé

(Roman / 2017)

Couverture du roman Légende d'un dormeur éveillé de Gaëlle Nohant

Vous en rêviez ? Gaëlle Nohant l’a fait ! Elle a voyagé dans le temps. Direction Paris, Montparnasse, la fin des Années folles. L’insouciance, la poésie, la fête, les nuits chaudes, la joie de vivre sans retenue, le partage des corps et des idées, la confrontation des convictions et des valeurs, le refus de l’établi, la volonté de refaire le monde, mais aussi la précarité des artistes qui ont du mal à joindre les deux bouts et les nuages qui s’amoncellent au-dessus de l’Europe. La guerre civile espagnole avec ses questions et ses victimes. Le Front populaire et ses espoirs. Puis le martèlement des bottes. L’odeur nauséabonde de la haine qui traverse les frontières. La guerre qui touche la France. L’Occupation. L’indicible aussi.

Gaëlle Nohant est généreuse. Avec ce livre, elle nous offre un compte-rendu émouvant et précis de son voyage.

Gaëlle Nohant nous gâte au-delà de nos rêves. Durant son voyage elle a suivi le parcours d’un poète, d’un héros, d’un homme de conviction, amoureux, libre dans ses décisions et dans sa tête, même aux pires moments de l’Histoire et de son histoire. Cet homme n’est autre que Robert Desnos, poète surréaliste, résistant, combattant de l’ombre et opposant à toute forme de dictature ou de servitude, amoureux de la vie.

Dans ce récit, Gaëlle Nohant navigue avec élégance et maîtrise entre l’intime du poète et la grande Histoire. Elle partage avec nous le quotidien de Robert Desnos et de l’excessive Youki. Nous vivons avec Robert et Youki, avec leurs amis, Jacques Prévert, Jean-Louis Barrault et Madeleine Renaud, Paul Éluard, Aragon et Cocteau, avec Theodore et Ghita Fraenkel, avec Yvonne George, avec l’intransigeant André Breton, avec Jeanson, Crevel et Artaud, avec Pablo Neruda et Federico García Lorca, avec Picasso, Man Ray et Foujita, avec André Verdet et Michel Hollard, avec des amis rencontrés dans des circonstances tragiques, avec d’abjects individus aussi, connus ou non, qui ont choisi le camp de la haine.

Merci Gaëlle Nohant pour cet hymne à l’amour, à l’amitié, à la vie et à la liberté. Une réussite totale, bouleversante, marquante.

L’auteure et son œuvre

Gaëlle Nohant est née en 1973 à Paris. Elle est notamment l’auteure de cinq romans : L’Ancre des rêves (2007), La part des flammes (2015), Légende d’un dormeur éveillé (2017), La femme révélée (2020), Le bureau d’éclaircissement des destins (2023) et du recueil de nouvelles L’homme dérouté (2010).

Mon Gaëlle Nohant ++

J’ai lu trois romans de Gaëlle Nohant. J’ai été subjugué à chacune de ces lectures.

La part des flammes

(2015)

Quand Gaëlle Nohant entreprend un projet, elle ne fait pas les choses à moitié. Elle s’y investit corps et âme. Ça se ressent à la lecture de ses romans. Elle met ses tripes dans ses livres, les vit autant que ses personnages. Le résultat est bluffant.

Elle ne laisse rien au hasard dans ses romans historiques où on sent le phénoménal et minutieux travail de documentation qui lui permet de nous offrir de passionnantes expériences de lecture, détaillées, réalistes et justes. Comme elle est aussi exigeante avec son écriture qu’avec son contenu et comme elle parvient à y insuffler autant d’émotions que d’actions, d’informations et de descriptions, ses écrits sont un vrai bonheur pour ses lecteurs.

Mai 1897. Le Tout-Paris se presse à la plus mondaine des ventes de charité. Un événement majeur pour les dames de la haute société qui s’y montrent, affichent leur générosité, se comparent les unes aux autres. Et puis, le drame. Un feu se déclare, se propage, les transforme en torches humaines. Les organisateurs sont débordés, les issues inadaptées au nombre de personnes présentes dans le bâtiment.

L’incendie du Bazar de la Charité plonge la capitale dans la stupeur et le deuil. Le nombre de victimes s’alourdit au fil de la fouille des décombres. L’identification sera éprouvante pour les familles. Des corps sont méconnaissables.

La part des flammes suit le destin de trois femmes : Sophie d’Alençon, la soeur de Sissi, qui consacre de son temps et de son argent aux tuberculeux, Violaine de Raezal, une comtesse persona non grata dans son milieu depuis qu’elle est jeune veuve et Constance d’Estingel, une jeune femme de bonne famille qui peine à trouver sa voie entre sentiments et foi. Trois femmes courageuses qui se battent dans un monde dominé par les hommes, les lois et la religion. Gaëlle Nohant pointe du doigt la condition déplorable de la femme en France il y a une grosse centaine d’années à peine.

Ce formidable récit romanesque m’a fait voyager dans le temps. J’avais l’impression d’évoluer en 1897. La restitution de l’époque et le travail sur les personnages imparfaits sont remarquables.

Captivant !

Le bureau d’éclaircissement des destins

(2023)

A chaque lecture d’un roman de Gaëlle Nohant, je ressens l’exigence de l’excellence de l’auteure. Tout est en place, l’histoire, les personnages, chaque phrase, chaque mot. Tout est juste. La rigueur historique, la construction du récit, l’écriture. Je ressens une alchimie entre Gaëlle Nohant et ses écrits. Une plume, une voix, un besoin de crier la vie de ses héros connus ou non à la face du monde. Un peu comme Jacques Brel ou Jean Ferrat dans certaines chansons. Des condensés d’émotion pure. Gaëlle Nohant parvient à réaliser cet exercice périlleux sur l’intégralité de ses romans. Pas une mince affaire. Le bureau d’éclaircissement des destins ne déroge pas à la règle.

Dans ce livre, Gaëlle Nohant rend un extraordinaire hommage aux « effacés » des camps de la mort disparus sans laisser de traces, aux familles déchirées par les assassins et leur implacable programme d’aryennisation qui passait notamment par le Lebensborn, aux survivants qui n’ont jamais réussi à quitter complètement les Lager nazis, aux femmes et aux mères prises dans les griffes de tortionnaires inhumains, à toutes ces victimes innocentes et anonymes.

Gaëlle Nohant met aussi en lumière le formidable travail de l’International Tracing Service et de tous les archivistes qui cherchent, compilent, conservent, essayent de comprendre et de recoller les morceaux, se battent pour la vérité, aident les victimes à se reconstruire par leur travail méticuleux et leur disponibilité lorsque leur domaine s’y prête. Avec patience, persévérance et obstination. Dans l’ombre. Envers et contre tout.

Les titres des chapitres sont des prénoms. Ou comment rendre leur identité aux oubliés et retisser des liens coupés. Beau.

Le bureau d’éclaircissement des destins est un livre authentique, généreux, précis, indispensable.

Extraits

Je ne suis jamais rentrée du camp. J’y suis toujours.

Ce qui est affreux avec les enfants, c’est qu’on ne peut pas les protéger.

Nous étions des morts en sursis.

Chaque nuit, je l’entends. Elle hurle en moi.

À découvrir aussi (clic sur le titre pour en savoir davantage)

D’autres lectures
Alice Zeniter – L’art de perdre
Val McDermid – Série « Tony Hill et Carol Jordan »

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Strasbourg, lecture publique le 14/06/2024

Strasbourg, capitale mondiale du livre 2024

Lecture publique Ecrire contre la haine 14 06 2024

Dans ce cadre aura lieu une lecture publique le 14 juin à 19 heures à la librairie Au bonheur des livres, 11 rue du Général Castelnau.

Au programme :

Le village disparu, ma nouvelle qui a remporté le Prix Bernard Lecache 2023 attribué à l’issue du concours Écrire contre la haine organisé par la LICRA.

Et deux autres nouvelles primées et éditées dans le recueil Écrire contre la haine : Les couleurs de la liberté, d’Isabelle Warion, et À mon ami Jesse, de Vincent Di Serio.

En bonus, des intermèdes musicaux offerts par la lectrice Delphine Miesch-Kretz.

Venez nombreux, je vous y attends !

Numéro 6 : premier avis

J’ai deux bonnes nouvelles à partager avec vous aujourd’hui.

Je travaille depuis de longs mois sur mon sixième livre, un roman. J’ai terminé l’écriture du premier jet, j’ai laissé reposer et j’ai attaqué l’étape de relecture qui me permet de corriger et d’améliorer.

Un premier grand bonheur : j’ai achevé mon ultime relecture de ce numéro 6, celle qui a mis un terme à cette fastidieuse mais indispensable étape de relecture.

C’est un moment magique de se dire «Ça y est, c’est fini ! ». Mais ce n’est que la fin d’une étape en réalité et à ce stade, je suis le seul à avoir lu ne serait-ce qu’une ligne de mon roman. Celles et ceux qui ont lu mes livres savent qu’ils sont parfois atypiques. À la fin de cette étape et jusqu’à être rassuré par un premier regard externe, les questions pernicieuses reviennent me hanter : « Mais qu’est-ce que ça vaut ? Quelqu’un va-t-il prendre plaisir à lire ÇA ? ».

J’ai donc envoyé un courriel avec mon roman en copie à ma première relectrice qui est aussi ma première correctrice, lui demandant de le lire dans un premier temps pour « en profiter » (!) et me dire si c’était éditable, les corrections n’étant absolument pas urgentes.

Il y a eu un échange de messages le lendemain matin (pas avares en smileys 😉 ) :

Elle :
Ah, je ne te félicite pas de me l’avoir envoyé le soir et je ne me félicite pas non plus de l’avoir découvert après minuit et d’avoir voulu en lire « un peu » avant d’aller me coucher !
😀 😀 😀 😀 😀 😀 😀 😀

Moi :
😀 😀 😀 😀
T’as été loin ?!?

Elle :
Je l’ai terminé !

Moi :
😳
Alors ? 😮 😮 😮 😮

Elle :
A ton avis ? Pour que je le finisse d’une traite ?!

Moi :
Alors, tu valides ?

Elle :
Et comment ! C’est excellent !!!
Ça fonctionne sacrément bien !

Moi :
MERCI !!!!!! 😀 🙂 😀 🙂 😀

Comme vous l’imaginez, cet avis constitue un énorme deuxième bonheur et compense largement les questionnements et les phrases réécrites et retournées dans tous les sens lors de l’étape de relecture !

Le processus suit son cours. Je publierai ce numéro 6 cet automne, début novembre certainement. J’espère qu’il suscitera autant d’enthousiasme auprès de vous qu’il en a suscité auprès de ma première lectrice !

Daniel Keyes – Des fleurs pour Algernon ♥

(Science-fiction / 1966 / Flowers for Algernon)

Couverture du roman Des fleurs pour Algernon,de Daniel Keyes

Charlie Gordon, 32 ans, est employé dans une boulangerie. Il est simple d’esprit aussi. Ce qui lui vaut d’être victime de moqueries et de farces douteuses, à son insu.

Algernon est une souris de laboratoire. Un traitement a décuplé son intelligence.

Le même traitement est administré à Charlie.

La psychologue Alice Kinnian assiste Charlie Gordon dans sa métamorphose et sa découverte d’un monde qu’il avait habité sans le comprendre.

Commentaire

L’idée de base était très simple. Daniel Keyes en a fait un petit chef-d’œuvre en ajoutant notamment une idée de génie à son idée de base : l’histoire est racontée par Charlie Gordon lui-même, ce qui permet au lecteur de suivre son évolution au fil de ses apprentissages et de ses expériences, physiques et émotionnelles.

Ce roman m’a tenu en haleine, parce qu’une histoire n’est jamais vraiment simple. Il m’a fait rire aussi, pleurer, réfléchir. Au regard que nous portons, consciemment ou non, sur ceux qui sont différents et vulnérables. À la cruauté de certains propos blessants énoncés sur le ton de la plaisanterie. À la place des sentiments dans une vie. À l’importance à donner au savoir. Au bonheur. L’intelligence rend-elle heureux ?

Des fleurs pour Algernon est une leçon d’humanité et d’humilité. Bouleversant.

Ce roman est classé en SF mais il n’est pas nécessaire d’être fan de science-fiction pour l’apprécier pleinement.

À lire au moins une fois dans sa vie.

L’auteur et son œuvre

Daniel Keyes est né le 9 août 1927 à Brooklyn et mort le 15 juin 2014.

Il a notamment écrit Des fleurs pour Algernon, d’abord sous forme de nouvelle en 1959 puis de roman en 1966, et Les mille et une vies de Billy Milligan (The Minds of Billy Milligan, 1981, paru une première fois en France sous le titre Billy Milligan, l’homme aux 24 personnalités) et Les mille et une guerres de Billy Milligan (The Milligan Wars, 1986), deux romans sur Billy Milligan, un violeur jugé non responsable de ses actes en raison de son trouble dissociatif de l’identité. Billy Milligan, l’homme au 24 personnalités a inspiré à M. Night Shyamalan le personnage principal de son film Split.

Daniel Keyes a aussi écrit d’autres nouvelles, cinq romans non traduits en français et un essai, Algernon, Charlie et moi (Algernon, Charlie, and I: A Writer’s Journey, 2000).

Mon Daniel Keyes ++

Je n’ai rien lu d’autre de cet auteur.

À découvrir aussi (clic sur le titre pour en savoir davantage)

D’autres lectures
Isaac Asimov – Les cavernes d’acier
Dezso Kosztolanyi – Anna la douce

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Ophélie Courtain – Tu n’iras pas fleurir la mienne ♥

(Roman / 2023)

Couverture du roman Tu n'iras pas fleurir la mienne d'Ophélie Courtain

Ghislaine, Farah, Mathilde et Antoine travaillent dans une association venant en aide aux femmes victimes de violences conjugales, des femmes dont la vie alterne entre phases idylliques et enfer à huis clos.

Lorsque l’une d’entre elles meurt sous les coups de son mari, ce drame ébranle leur quotidien. Derrière les portes closes, certaines attitudes éveillent des soupçons, et questionnent d’autant plus les couples en pleine crise.

Alors qu’ils côtoient la violence sous toutes ses formes et pensent savoir la reconnaître, ils découvrent qu’elle se manifeste parfois là où on ne l’attend pas.

(4e de couverture)

Commentaire

Si vous ne deviez acheter qu’un livre cette année, que ce soit celui-là.

Tu n’iras pas fleurir la mienne peut sauver des vies.

Ophélie Courtain a fait un travail considérable avant de se lancer dans l’écriture de ce roman. De documentation, de compilation de témoignages. Puis elle a digéré ces mines d’informations, souvent insoutenables très certainement. Ensuite elle a réfléchi aux personnages de son roman, à l’histoire. Elle a imaginé une construction imparable pour offrir une compréhension optimale des sujets sensibles abordés. Elle n’a rien laissé au hasard. C’est mon ressenti en tout cas. Le résultat est précis, poignant, percutant.

Tu n’iras pas fleurir la mienne aborde cinq thèmes : les violences conjugales et l’emprise amoureuse au sein du couple en premier lieu, mais aussi la différence, le deuil et les relations parents/enfants.

Ce livre est d’une grande justesse. Sur chaque sujet. Du début à la fin. Par sa rigueur et sa précision dans le verbe, et dans une thématique tout à fait différente, il m’a fait penser à La décision de Karine Tuil. Une claque.

Ophélie Courtain n’élude rien en nous parlant des violences conjugales d’une part, de la toxicité des manipulateurs d’autre part. Elle évite avec brio les pièges et clichés du genre. Elle ne fait ni dans le spectaculaire, ni dans le larmoyant. Ophélie Courtain décortique avec le scalpel et nous présente la gangrène et la beauté humaine, sans exagération et sans faux-semblant.

Elle se montre délicate dans le traitement de la différence, pudique dans celui du deuil. Elle nous parle de la famille, de ses non-dits, ses conflits, ses erreurs, son amour, la transmission, des suppositions, des vérités et des secrets emportés à jamais.

Ophélie Courtain traite ces sujets en 284 pages, en approfondissant avec une rare clairvoyance les deux premiers et en intégrant les autres avec une habilité remarquable.

J’ai dévoré ce roman captivant. J’en suis ressorti bouleversé.

Gros coup de coeur pour ce magistral « Tu n’iras pas fleurir la mienne ».

Un livre d’utilité publique. Merci Ophélie Courtain !

Un sérieux candidat au Goncourt ou au Femina.

L’auteure et son œuvre

Ophélie Courtain est une auteure française.

Passionnée par la psychologie et le développement personnel, ses romans décortiquent la complexité des relations humaines à travers des sujets de société qu’elle questionne.

Son premier roman Les coquelicots du désert (2021) traite du burn-out.

Tu n’iras pas fleurir la mienne est son deuxième roman.

Mon Ophélie Courtain ++

Je n’ai pas encore lu le premier roman d’Ophélie Courtain mais ça ne saurait tarder.

À découvrir aussi (clic sur le titre pour en savoir davantage)

D’autres lectures
John Irving – L’oeuvre de Dieu, la part du Diable
Gillian Flynn – Les lieux sombres

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