Amandine Bazin-Jama – Les médisantes

(Roman / 2021)

Juger les gens. Se moquer d’eux. Projeter ses angoisses, ses envies, ses petites jalousies sur de parfaits inconnus. Sans méchanceté aucune, bien sûr. Juste pour s’amuser entre copines attablées à sur la terrasse d’un café. Un sport national. Que celles qui n’ont jamais pratiqué leur jettent le premier caillou.

Le roman démarre avec deux protagonistes s’adonnant à ce petit plaisir mesquin. Calé dans mon fauteuil, sourire aux lèvres, j’étais prêt à embarquer pour une histoire à l’humour grinçant. Que nenni ! Amandine Bazin-Jama brouille les pistes. Maligne, elle nous mène en bateau et nous emmène de manière très intelligente petit à petit vers des sujets de plus en plus sérieux et complexes. Alors nous hochons la tête et approuvons à grands renforts de maximes. L’habit ne fait pas le moine. Il ne faut pas se fier aux apparences. On n’est pas dans la tête des autres. Méfions-nous des préjugés ! Etc.

La vérité est que nous ne connaissons pas la vie des gens que nous côtoyons de près ou de loin. Pire, nous ne savons pas ce qui se passe chez les personnes de notre entourage proche une fois la porte de leur maison refermée. Nous sommes capables d’imaginer un tas de choses, mais nous ne savons rien. De leur bonheur. De leurs craintes. De leurs drames. Des rires ou des larmes, des joies ou de la violence qui se jouent dans leur vraie vie. Rien.

Les médisantes transpire l’honnêteté, l’urgence, l’empathie, l’expérience professionnelle de l’auteure, et aussi cet humour grinçant auquel nous nous accrochons pour ne pas pleurer. Quand je disais que l’auteure était maligne. Elle est très douée aussi.

Un roman excellent, utile, intelligent et même drôle. Un roman qui fait froid dans le dos parce qu’après l’avoir refermé, nous nous demandons combien de familles que nous fréquentons vivent dans la barbarie au quotidien, combien de proches nous sourient alors qu’ils vivent dans un enfer de souffrances. Vigilance.

Merci Amandine Bazin-Jama.

L’auteure et son œuvre

Amandine Bazin-Jama est médecin généraliste. Elle vit dans la région Rhône-Alpes. Elle a écrit deux livres à ce jour : Les médisantes (2021) et Demandez à votre médecin traitant (2024).

Mon Amandine Bazin-Jama ++

J’ai lu et adoré aussi Demandez à votre médecin traitant.

Demandez à votre médecin traitant

(2024)

Ce deuxième livre d’Amandine Bazin-Jama, mi-fiction (les noms), mi-réalité (tout le reste), nous propose de partager pendant une semaine le quotidien de Bibi, une médecin généraliste.

L’expérience est concluante et confirme ce que nous savons tous, quelque part au fond de nous. Nos généralistes sont mal en point. Victimes de tous les maux de notre société. L’incivilité. Le manque de moyens du système de santé dans sa globalité (et donc trop de patients et des horaires insensés). La bureaucratie. Le mépris de certains « spécialistes ». Et bien entendu le stress généré par la nature de leur mission, parce qu’ils ne sont pas payés pour taper dans un ballon ou amuser la galerie sur un plateau télé, mais pour soigner des malades, physiquement et psychologiquement. Pour les aider à ne pas mourir lorsque cette mort est évitable. Ils représentent la porte d’entrée du monde de la santé. « Demandez à votre médecin traitant ! ». Ils récupèrent pêle-mêle les petits maux et des cas gravissimes qui s’ignorent. Un mauvais diagnostic peut avoir des conséquences fatales.

Nous voyons nos médecins traitants comme des figures inamovibles et inébranlables. À tort. Ils sont humains. Ils ont les mêmes problèmes logistiques, familiaux, physiques que tout un chacun. Des enfants à emmener à l’école ou au sport. Des repas à préparer. Une voiture à entretenir. Des appareils en panne. Des moments où ça va mieux ou moins bien. Un besoin de déconnecter. Des limites.

Ils sont entre le marteau et l’enclume, entre les malades et les spécialistes, entre les malades et un système de santé défaillant, entre la paperasse et la bureaucratie, entre des règlementations contreproductives et du bon sens salutaire, entre l’envie de soigner et les 24 h non extensibles d’une journée, entre le serment d’Hippocrate et leur vie personnelle à gérer.

Et parfois, ils finissent par craquer.

Nous, patients impatients et sourds et aveugles, savons quelque part au fond de nous que la vie de médecin généraliste est souvent un enfer. Merci néanmoins à Amandine Bazin-Jama de nous le rappeler, avec suffisamment d’humour pour ne pas en pleurer.

À lire absolument, bien sûr.

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Lord Dunsany – La fille du roi des elfes

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Guy de Maupassant – Romans ♥

Guy de Maupassant (05/08/1850 – 06/07/1893) est mon écrivain préféré. Je vous propose de découvrir ou redécouvrir les six romans qu’il a écrits : Une vie, Bel-Ami, Mont-Oriol, Pierre et Jean, Fort comme la mort et Notre cœur.

Une vie ♥

Son premier roman (1883)

Coup de cœur absolu.

Un de mes deux romans préférés (avec Martin Eden, de Jack London). Je l’ai relu une 3e fois, 21 ans après la 2e. J’en suis ressorti bouleversé, une fois encore. Une claque.

Une vie est l’histoire de Jeanne. À 17 ans, elle retourne vivre auprès de ses parents après 5 années passées au couvent, protégée des vicissitudes de l’existence. Radieuse, naïve et romantique, impatiente de vivre, elle rêve d’amour, de bonheur, d’inattendu, d’un avenir exaltant dans sa vie de château. Elle rencontre très vite un homme séduisant, se marie. Les désillusions se succèderont, cruelles.

Maupassant n’épargne pas cette jeune fille innocente qui a pour grande ambition de mener une vie heureuse. Il relate avec sobriété son existence malmenée.

Maupassant est en forme. Autour de Jeanne, tout le monde en prend pour son grade : l’aristocratie, le clergé, la religion, les hommes, les femmes, les époux, les épouses, les paysans, les domestiques, les pères, les mères, les enfants.

Il évoque le temps qui passe, l’infidélité et les mensonges du quotidien, la bestialité potentielle des plaisirs de la chair, l’avarice, le pragmatisme des petites gens, l’hypocrisie du monde, le sens de la vie, la folie qui guette et les illusions perdues des âmes pures et sensibles, non préparées, confrontées aux réalités de la vie et à la roublardise humaine.

L’histoire est d’un réalisme impressionnant, l’écriture de Maupassant remarquable de précision.

Les descriptions des lieux, des paysages et des saisons sont magnifiques. Les caractères des personnages très justes.

La condition et le courage de la femme de l’époque sont présentés face à la rudesse et la rusticité des hommes et de leurs privilèges. Le problème du consentement est mis en lumière.

La fin est brillante également.

Un chef-d’œuvre littéraire, un roman parfait de mon auteur préféré !

Extraits

On pleure parfois les illusions avec autant de tristesse que les morts.

La vie, voyez-vous, ça n’est jamais si bon ni si mauvais qu’on croit.

Bel-Ami ♥

Son deuxième roman (1885)

Georges Duroy, un ancien soldat en poste en Algérie, ne retourne pas dans sa campagne normande natale mais tente de se faire une place à Paris. Il végète à la Compagnie des chemins de fer du Nord lorsqu’il croise un ancien camarade de régiment qui a réussi dans le journalisme et qui l’introduit dans le milieu de la presse. Lorsqu’il se rend compte qu’il a du succès auprès des femmes, ce séducteur sans scrupule, arriviste et manipulateur, les utilise pour son plaisir et pour satisfaire ses ambitions : grimper les échelons de la société.

Maupassant nous livre une critique acerbe de cet opportuniste dénué de tout sentiment et prêt à tout, mais aussi de l’ensemble de l’hypocrite système qui permet à ce genre de personnage de réussir dans son entreprise : la presse aux méthodes douteuses en cheville avec la politique dont les représentants ne brillent que par leurs ambitions personnelles, la finance qui tire les ficelles dans l’ombre et la belle société et ses mœurs légères. Il ne se prive pas d’adresser des piques au clergé.

La plume précise, acérée et cynique de Maupassant va au-delà de l’ascension sociale de l’abject Duroy et de son utilisation indigne des femmes.

La place prépondérante de Duroy dans le récit est contrebalancée par la mise en lumière du rôle des femmes, certes privées de droits, mais réfléchies et influentes, indispensables auprès d’hommes manquant de subtilité et de clairvoyance. Sensibles aussi.

Et puis, Bel-Ami traite d’un autre thème cher à Maupassant, la mort, avec en toile de fond le temps qui passe, le sens de la vie et la solitude dans l’approche de la fin.

Certains livres comportent des passages qui marquent à vie. Bel-Ami est un de ces livres pour moi.

La tirade sur cinq pages de Norbert de Varenne est un de ces textes inoubliables (Première partie, chapitre VI – « Dans le royaume des aveugles… »).

Extrait

« Respirer, dormir, boire, manger, travailler, rêver, tout ce que nous faisons, c’est mourir. Vivre enfin, c’est mourir ! »

Deuxième roman de Maupassant, deuxième chef-d’œuvre.

Mont-Oriol

Son troisième roman (1887)

Maupassant nous emmène en Auvergne dans ce Mont-Oriol, un roman plus complexe qu’il n’y paraît. Ses personnages cocasses, ses duperies invraisemblables et ses rivalités et aventures dans une ville d’eau pourraient faire croire à une grosse farce, mais Maupassant utilise ces ficelles pour mieux appuyer là où ça fait mal et offrir des pistes de réflexion à ceux qui ont envie de creuser au-delà de ce décor comique.

Le premier sujet de ce roman concerne la création d’une nouvelle station thermale. Une histoire de spéculations, de tractations, de concurrence, de réclame (publicité), de calculs, de luttes d’influence, le tout tournant autour des intérêts financiers des uns et des autres. De beaux discours, oui, mais les pensées toujours focalisées sur le sacro-saint argent. Les espèces sonnantes et trébuchantes passent sans surprise au-dessus des principes.

L’amour est le deuxième sujet de Mont-Oriol. Maupassant présente des protagonistes occupés par le besoin élémentaire de l’homme et de la femme de s’unir en veillant à respecter les convenances. Sa plume précise et sans concession décrit le fossé qui sépare les hommes et les femmes dans leur appréhension des sentiments et du couple.

Les femmes sortent grandies de cette mise en parallèle. Elles éprouvent des sentiments sincères, profonds, dénués de calculs et d’artifices. Elles s’attendent à être aimées en retour. Maupassant exprime magnifiquement les désirs de la femme, ainsi que la transformation de la jeune fille qui s’amuse de jeux ingénus en la femme éprise passionnément qui se sent heureuse ou perdue et les interrogations qui accompagnent cette perte de l’innocence.

Les hommes fréquentent les femmes pour les plaisirs faciles. Pour les affaires sérieuses, ils sont soit calculateurs, et donc dénués de sentiments véritables, soit éperdument passionnés, un temps, avant de se lasser très vite de la femme adorée. De piètres maris.

Maupassant explore des sujets qui lui tiennent à cœur : la solitude, au sein même d’un couple, sa relation envers les femmes enceintes, la paternalité et la bâtardise.

Il profite de son cadre pour réunir une vaste galerie de personnages et mettre en évidence les failles, la médiocrité et les travers de l’être humain, éternel insatisfait, tricheur, égoïste et hypocrite. Cinq catégories ont droit à une analyse particulièrement poussée : les paysans, attachés à leurs terres mais surtout à l’argent, les médecins et les limites de leurs compétences dissimulées sous différents subterfuges, les malades et leurs maux, les mondains et les banquiers.

Se pose enfin la question de la valeur des choses, des sentiments et des personnes. Maupassant interroge mais laisse au lecteur le soin de se faire sa propre opinion.

Extrait

Ceux-là seuls sont heureux qui souffrent par leurs sensations, qui les reçoivent comme des chocs et les savourent comme des friandises. Car il faut raisonner toutes nos émotions, heureuses ou tristes, s’en rassasier, s’en griser jusqu’au bonheur le plus aigu, ou jusqu’à la détresse la plus douloureuse.

Pierre et Jean

Son quatrième roman (1888)

Maupassant nous fait visiter Le Havre et ses environs. Il nous relate l’histoire de la famille Roland, mari, femme et deux fils. La visite surprise du notaire va bouleverser leur existence.

L’humour est absent dans ce roman sombre, oppressant et triste. Les descriptions sont magnifiques.

Maupassant greffe les sujets de réflexion sur une histoire de jalousie entre deux frères aux caractères opposés. Il aborde deux thèmes récurrents dans son œuvre : l’identité du père et la menace des pulsions qui prennent le pas sur la raison et risquent de mener à la folie. Il brosse des portraits d’hommes primaires et de femmes sensibles et réfléchies. Dans ce roman, il est aussi question du mauvais assortiment des couples, de l’érosion de l’amour, de qui a le droit de juger, du pardon, de la crainte du qu’en dira-t-on et de la perte de l’honorabilité, des mauvaises langues capables de colporter le pire, vrai ou faux.

Maupassant pose enfin la question ultime : jusqu’où sacrifier sa vie et renoncer au plaisir et à l’épanouissement personnel au nom du devoir et des convenances qui broient tout espoir de lumière et de bonheur ?

Le plus court des six romans de Maupassant.

Extraits

Le désir du mariage l’effleura. On n’est pas si perdu, n’étant plus seul. On entend au moins remuer quelqu’un près de soi aux heures de trouble et d’incertitude, c’est déjà quelque chose de dire « tu » à une femme, quand on souffre.

Le baiser frappe comme la foudre, l’amour passe comme un orage, puis la vie, de nouveau, se calme comme le ciel, et recommence ainsi qu’avant. Se souvient-on d’un nuage ?

Roman

En première partie, un intéressant essai intitulé Roman. Dans la guerre des clochers que se livrent les écoles littéraires, Maupassant se place au-dessus de la mêlée et milite pour une pragmatique ouverture d’esprit. Respect, mon auteur préféré !

Extraits

Un critique devrait rechercher tout ce qui ressemble le moins aux romans déjà faits, et pousser autant que possible les jeunes gens à tenter des voies nouvelles.

Il faut être, en effet, bien fou, bien audacieux, bien outrecuidant ou bien sot, pour écrire encore aujourd’hui ! Après tant de maîtres aux natures si variées, au génie si multiple, que reste-t-il à faire qui n’ait été fait, que reste-t-il à dire qui n’ait été dit ?

Fort comme la mort

Son cinquième roman (1889)

Le peintre Olivier Bertin connaît un certain succès, notamment avec son magnifique portrait de sa maîtresse, la comtesse Anne de Guilleroy. Les années passent et le temps fait son œuvre.

Fort comme la mort est un drame saisissant. Trois thèmes prédominent : le vieillissement, la solitude et l’amour. Trois sujets chers à Maupassant.

Le vieillissement de l’homme, de la femme. Quand la chair se fane, se ride. Quand les traits s’épaississent. Quand la beauté s’estompe. Alors que l’esprit s’assagit, que les désirs et la passion ne faiblissent pas (« C’est la faute de nos cœurs qui n’ont pas vieilli. Je sens le mien si vivant ! »), le corps trahit, lui ! Maupassant, par une idée géniale dont il a le secret, plonge son héros dans un impossible retour dans le passé. Mais il faut se rendre à l’évidence : le temps qui passe ne revient pas, la fraîcheur et la beauté de la jeunesse sont éphémères.

La solitude a hanté Maupassant, comme elle hante Olivier Bertin. Une grande maison vide. Ces heures à occuper, futiles, longues, creuses, et pourtant si précieuses parce qu’elles filent pour toujours.

Et l’amour ! Thématique souvent traitée par Maupassant avec beaucoup de finesse. Dans ce roman, il y apporte un supplément de profondeur et de psychologie. L’amour sincère entre un amant et une maîtresse qui a traversé les années et les crises de jalousie subit l’épreuve du temps et des souffrances associées. La boucle est bouclée avec le premier thème.

Maupassant invoque la fatalité.

Il en résulte la grande question du sens de la vie. Une éternelle interrogation, abordée d’un point de vue différent de celui adopté dans cet autre chef-d’œuvre qu’est Une vie.

Le « On pleure parfois les illusions avec autant de tristesse que les morts. » de Une vie trouve son écho dans Fort comme la mort : « Ils pleuraient sur ces lettres, comme on pleure sur les morts parce qu’ils ne sont plus. » Dans le premier, on pleure sur ce qui ne sera pas, dans le second sur ce qui a été.

Le deuil est omniprésent dans ce roman. Deuil d’une personne chère, d’un amour passé, de la jeunesse disparue, de tendres mots échangés.

Maupassant fait se rencontrer les mondains et les artistes. Avec tout ce que les premiers ont d’hypocrite et de superficiel, mais pourtant aussi de pragmatique (le comte qui ne s’intéresse qu’à la politique et l’agriculture, la hautaine duchesse de Mortemain, les transparents Corbelle et l’encyclopédique Musadieu) et tout ce que les seconds ont de créatif, de sensible et de fragile. L’amour caché parvient à réunir les deux mondes.

Maupassant utilise la puissance de l’art pour évoquer des images fortes et attiser les sentiments : peinture, musique, littérature, opéra jouent tour à tour un rôle central dans la trame de ce drame.

Fort comme la mort alterne entre passages introspectifs, descriptions contemplatives et dialogues poignants, sur fond de prise de conscience pessimiste et désespérée de l’inéluctable.

J’en suis ressorti bouleversé.

Un chef-d’œuvre de plus de Maupassant !

Notre cœur

Son sixième roman (1890)

Pour moi, le roman le plus étrange de Maupassant et en même temps celui qui paraît le plus simple. Le plus étrange parce qu’il paraît simple mais qu’en réalité il ne l’est pas tant que ça.

Notre cœur est une histoire d’amour entre deux êtres, une histoire de passion. Au début de ma lecture, j’ai eu peur qu’il ne s’agisse que de cela, mais j’ai eu tort de douter de Maupassant. Notre cœur est une étude psychologique sur le sentiment amoureux.

De toute façon, un amour n’est jamais simple.

Maupassant nous présente deux visions diamétralement opposées d’aimer. La réplique d’un protagoniste résume bien cette différence de perception de l’amour :

— Ah ! quelle bizarre manière de comprendre l’amour et d’en parler ! Je suis pour vous quelqu’un que vous désirez, en effet, avoir souvent, sur une chaise, à votre côté. Mais pour moi vous emplissez le monde ; je n’y connais que vous, je n’y sens que vous, je n’y ai besoin que de vous.

La plume de Maupassant est toujours aussi précise, ses analyses pertinentes, ses descriptions travaillées et ses personnages fouillés. Outre la dissection des sentiments, le lecteur vit les rivalités entre ces femmes qui s’escriment à s’entourer du gratin des mondains et des artistes en vogue, à plaire et à faire parler de leur salon dans les cercles qui comptent et entre ces hommes menés par le bout du nez qui s’efforcent de séduire les belles.

Le seul point négatif de ce livre se trouve dans les (rares) passages où Maupassant s’aligne sur la vision de Schopenhauer très étriquée et erronée de la femme, qui peut le faire paraître misogyne et sexiste. Cette considération très limitée est heureusement contrebalancée par les caractères complexes des personnages féminins du roman, des femmes intelligentes, subtiles et vives d’esprit.

Cette étude réussie de la passion amoureuse interroge et peut trouver un écho dans le vécu de chacun, suivant ses propres expériences. À déguster puis à méditer.

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